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Éco-conception numérique : genèse et application du référentiel RGESN

6 juin 2024
Stratégie Digitale - Green web
Ce n'est plus un secret, si le numérique nous apporte énormément au quotidien, il est aussi très énergivore. Eh oui, face à l'évolution rapide de la technologie, la planète ne nous dit pas merci ! Or, c'est justement pour la préserver que l'éco-conception numérique se développe, notamment à travers le RGESN.


Selon une étude de 2023 de l’ADEME, le numérique représenterait 2,5 % de l'empreinte carbone française, et cela, sans parler des nombreux autres impacts environnementaux (épuisement des ressources, recyclage, etc.). Alors que nous sommes embarqués dans une course toujours plus folle à la technologie, surtout depuis l'essor des objets connectés, réduire l'empreinte environnementale du numérique d'ici 2030 est devenu un enjeu majeur.

C'est dans ce contexte que l'écoconception numérique s'inscrit comme un levier de choix pour inverser la tendance. Et pour permettre à tous d'adopter les meilleures pratiques en la matière, il est désormais possible de compter sur le RGESN (Référentiel Général d’Éco-conception des Services Numériques), qui présente la voie à suivre pour appliquer ce principe à n'importe quel service numérique. Mais qu'est-ce que le RGESN ? Comment a-t-il été créé et par qui ? Et surtout, quelles sont ses recommandations ? On fait le point.

Photo vue du dessus d'un clavier d'ordinateur avec des touches noires et une touche verte où il est inscrit « Go green ».

La loi REEN, à la base du référentiel RGESN

Si vous êtes au fait de l'actualité dans le secteur du numérique, vous avez sûrement entendu parler de la loi REEN. Mais savez-vous vraiment ce qu'elle implique ? Tâchons d'éclairer votre lanterne.

Une prise de conscience nécessaire

Pour faire simple, la loi REEN met l'accent sur la prise de conscience des différents impacts environnementaux du numérique. Les articles 1 à 3 de cette loi prévoient notamment des modules de formation et de sensibilisation au numérique responsable dans les écoles et les établissements d'enseignement. D'ici quelques années, il y a donc fort à parier que vos enfants apprendront à utiliser les services numériques de façon éco-responsable.

Limiter le renouvellement des appareils numériques

Mais la loi REEN va encore plus loin en se penchant sur la question des appareils numériques et de leur renouvellement. Elle interdit ainsi les pratiques d'obsolescence, notamment logicielles, et veille à ce que les informations sur les mises à jour soient claires et compréhensibles pour les utilisateurs. De plus, tous les distributeurs doivent promouvoir le reconditionnement et prodiguer des conseils qui visent à prolonger la durée de vie des équipements.

Favoriser l’adoption d’usages numériques écoresponsables

Vous l'avez sans doute compris, l'un des piliers de la loi REEN est l'adoption d'usages numériques éco-responsables. C'est donc ici qu'entre en jeu le référentiel RGESN, qui établit des critères de conception durable pour les services numériques en vue de réduire leur empreinte environnementale. Par exemple, il propose des recommandations pour informer les utilisateurs sur l'impact environnemental de la vidéo en ligne.

Des centres de données et réseaux plus verts

Dans la lignée du reste, la loi REEN encourage la création de centres de données et de réseaux moins énergivores. Les mesures incluent, entre autres, la réutilisation de la chaleur produite et la limitation de la consommation d'eau pour le refroidissement. Et à ce propos, les opérateurs de communications électroniques doivent publier les indicateurs clés qui résument leurs efforts en matière de transition écologique.

Une stratégie numérique responsable à l’échelle locale

Pour finir, la loi REEN promeut également l'écoconception dans les territoires. Elle impose ainsi aux villes et intercommunalités de plus de 50 000 habitants de définir une stratégie numérique responsable d'ici le 1er janvier 2025. Cela signifie notamment que ces collectivités intègrent des éléments d’éco-conception dans leurs services numériques.

Seulement voilà, pour beaucoup, le concept même d’écoconception numérique est flou. À moins d'avoir de solides notions sur le sujet, la mise en œuvre de la loi REEN n'est donc pas simple pour tout le monde. C'est pour cette raison qu'il a fallu trouver une solution pour apporter des réponses concrètes aux non-initiés.

 

Le RGESN : un référentiel pour de meilleurs usages numériques

Pour encadrer les mesures de la loi REEN, un document qui récapitule les recommandations à connaître a vu le jour : le RGESN (Référentiel Général d’Éco-conception des Services Numériques). Et vous allez le voir, celui-ci est particulièrement dense.

Origines et rôle du référentiel RGESN

Depuis sa création, le référentiel RGESN a connu certaines évolutions.

Tout commence en 2020, lorsque l'Institution du Numérique Responsable (INR) rassemble une centaine d’experts pour travailler sur un projet monumental de référentiels destiné à l'éco-conception de services numériques. Et le moins que l'on puisse dire, c’est qu’ils visaient haut ! En effet, leur but était de lister les recommandations pratiques applicables à tous les types de services numériques, à chaque étape du cycle de vie, et pour chaque personne impliquée. Un sacré défi !

Dès 2021, cette belle dynamique aboutit à la création du GR491, qui compte près de 61 recommandations et 516 critères. Peu après, un autre référentiel voit le jour grâce à la Direction Interministérielle du Numérique (DINUM), qui s'est alors inspirée de ce travail préliminaire pour élaborer le RGESN. Une première version a même été proposée en consultation publique par l'Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes (ARCEP) à la fin de 2023, avant la sortie de sa version définitive le 17 mai 2024.

Contrairement aux idées reçues, le rôle du RGESN n'est pas de vérifier si un service numérique est éco-conçu. Il est plutôt question d'accompagner la démarche d’éco-conception pour que celle-ci soit correctement mise en œuvre. Et cela inclut tous les acteurs : depuis l'hôte du service jusqu'aux fournisseurs de composants.

Comme abordé précédemment, les principaux objectifs de ce référentiel sont de limiter la consommation de ressources informatiques et de réduire l'obsolescence des équipements. La démarche s'inscrit dans une logique volontaire d'amélioration continue. Tout n'a pas besoin d'être parfait dès le départ, d'autant plus qu'aucun label ou certificat n’est prévu pour le moment.

Bon à savoir : En matière d'accessibilité numérique, le RGESN fixe ses propres règles. Là où le RGAA (Référentiel Général d'Amélioration de l'Accessibilité) contrôle l'accessibilité d'un service numérique en utilisant les critères des WCAG (Web Content Accessibility Guidelines) émis par le W3C, le RGESN pave sa propre voie sans se baser sur un référentiel international.

Champ d'action et recommandations du référentiel RGESN

Dans sa version définitive du 17 mai 2024, le référentiel RGESN propose un ensemble de 78 critères, présentés sous forme de questions pratiques. Ces dernières aident ainsi à évaluer si le service numérique, qu'il soit déjà en fonction ou encore en phase de conception, s'inscrit bien dans une démarche d'éco-conception. Notons que chaque question est accompagnée d'une fiche détaillée qui guide la réflexion et l’action vers la bonne direction.

Qui dit 78 critères dit donc 78 fiches pratiques qui donnent des exemples concrets adaptés aux différents métiers du numérique. Architecture du service, expérience utilisateur, ou même aspects plus techniques, comme le backend ou le frontend, ces fiches offrent un guide clair pour intégrer l'écoconception à chaque étape d’un projet.

Attention, ces critères ne sont pas là pour être contraignants, mais pour orienter vers des meilleurs réflexes environnementaux. C'est pour cette raison que chaque critère est classé selon 3 niveaux de priorité :

  • le niveau « prioritaire » ;
  • le niveau « recommandé » ;
  • le niveau « modéré ».

Ces priorités permettent évidemment de savoir où concentrer ses efforts en fonction de l'impact environnemental de chaque action, mais aussi de son effet systémique sur d'autres secteurs et du niveau d'ambition nécessaire pour sa mise en œuvre. Elles donnent aussi une première tendance bienvenue pour déterminer où le commanditaire du projet souhaite intervenir en premier lieu.

Dernier point, et non des moindres, les questions pratiques abordées dans le RGESN sont classifiées selon 9 thématiques principales, chacune traitant un aspect crucial de la conception et de la mise en œuvre des services numériques éco-responsables.

  1. Stratégie, qui concerne la définition des objectifs environnementaux et la manière de piloter un projet numérique pour minimiser son empreinte écologique.
  2. Spécification, à savoir les contraintes et les spécifications du projet qui influencent toute la durée de vie du service. Une bonne spécification permet de réduire les ressources nécessaires et d'optimiser les performances environnementales dès le début.
  3. Architecture, qui traite de la conception technique du service, y compris la relation entre le frontend et le backend. Comment les composants du service interagissent-ils ? Favorisent-ils une consommation réduite de ressources ?
  4. Expérience et interface utilisateur (UX/UI), pour concevoir des interfaces qui engagent les utilisateurs et les encouragent à adopter des comportements durables.
  5. Contenu, qui se concentre sur les informations et médias à intégrer dans le service. Comment s’assurer que le contenu est utile sans être excessivement gourmand en données ou en ressources ?
  6. Frontend, à savoir l'ensemble des technologies et pratiques que les utilisateurs finaux utilisent directement. Optimiser cette partie peut significativement réduire la charge de travail des appareils utilisateurs et, par conséquent, leur consommation d'énergie.
  7. Backend, pour que les composants serveur du service soient conçus afin de maximiser l'efficacité et de minimiser les déchets de données et d'énergie.
  8. Hébergement, qui s’intéresse aux décisions prises sur la manière d’héberger et le lieu d’hébergement du service. Opter pour des data centers verts ou des solutions d'hébergement éco-énergétiques est primordial pour réduire l'empreinte carbone.
  9. Algorithmie, qui se concentre sur l'intelligence artificielle. Si le service utilise l'IA, cette partie aide à appliquer les principes d'éco-conception qui réduisent la consommation de ressources pendant les phases d'entraînement et d'inférence.

RGESN : un référentiel qui fait partie d'un tout

S'intéresser au référentiel RGESN implique de ne pas être hypocrite. Avant d'aller plus loin dans cette démarche, il convient en effet de se poser les bonnes questions quant au service numérique concerné. Est-il vraiment nécessaire ? N'y a-t-il aucune autre alternative moins gourmande en ressources numériques ?

Parce que oui, la mise en œuvre du RGESN n'est pas seulement une affaire de cases à remplir. Ce référentiel joue un autre rôle bien spécifique : compléter et harmoniser les services avec les autres cadres normatifs existants. Un projet numérique respectueux de l’environnement, mais inaccessible à certains utilisateurs, ou non sécurisé, n’aurait pas beaucoup de sens, n’est-ce pas ?

L'utilisation du RGESN doit donc être coordonnée avec d'autres référentiels comme le RGAA pour l'accessibilité, le RGS pour la sécurité, le RGI pour l’interopérabilité et le RGPD pour la protection des données personnelles. Pensez à lui comme à un membre d'une équipe : seul, il peut faire des choses intéressantes, mais c'est en travaillant avec les autres qu'il maximise son efficacité.

À ce propos, un outil plus accessible que ces référentiels a été lancé par des designers éthiques : l'Index Conception Responsable. Ce dernier vient compléter les guides officiels susmentionnés (il réunit de nombreux critères, RGAA, RGESN, RGPD, etc., en un seul et même support) et accompagne les professionnels lors du développement de produits numériques éthiques.

Évaluer un service numérique grâce au référentiel RGESN

Vous saisissez probablement un peu mieux les spécificités du RGESN. Mais vous vous demandez peut-être comment évaluer concrètement un service numérique sur la base de ces recommandations. Or, la réponse est directement incluse dans le référentiel.

D'une part, comme nous l'avons vu plus haut, pour chaque critère, il existe une fiche pratique qui détaille les étapes à suivre et les conditions à respecter. Ces dernières vous guident pas à pas, peu importe votre profil (concepteur, éditeur ou fournisseur de services numériques).

D'autre part, le RGESN propose aussi des outils d'autoévaluation sous forme de tableurs (Office Open XML et OpenDocument). Ils vous permettent non seulement de rédiger votre déclaration d’éco-conception, mais aussi de calculer facilement votre score d’avancement.

Bon à savoir : Si toute la démarche d'application du référentiel RGESN est, comme nous l'avons déjà dit, volontaire, la publication d'une déclaration d’écoconception est indispensable pour vous en prévaloir. C'est elle qui documente votre parcours en toute transparence vis-à-vis des utilisateurs et des parties prenantes.

Signalons aussi que le score d'avancement n'est pas un indicateur de l'impact environnemental direct de votre service, mais uniquement un suivi de la mise en œuvre des critères du RGESN. Plus vous validez de critères, plus votre score augmente, ce qui démontre que vous progressez dans votre démarche d'un numérique plus responsable.

L’avenir du RGESN : entre application et démocratisation

Mais alors, est-ce que le RGESN va réellement influencer le petit monde des services numériques en Europe ? La réponse n'est pas si simple. En effet, au-delà des directives qui y sont recensées, ce référentiel est également un outil évolutif, qui va probablement devoir sans cesse s'adapter à notre façon de concevoir et de mettre en œuvre les services numériques.

Ce qui semble certain, c'est que le RGESN va s'étendre au-delà des sites Web. Par exemple, les applications mobiles représentent aussi un enjeu majeur en termes d'écoresponsabilité. Et ce n'est pas tout, puisque le numérique est partout, y compris dans nos rues ! La preuve en est avec les nouveaux panneaux d'affichage de publicité.

Plusieurs questions demeurent néanmoins. La base du volontariat suffira-t-elle à démocratiser les bonnes pratiques d'écoconception ? Et comment s'assurer que les recommandations ont bien été appliquées ? Pour le moment, il faut seulement compter sur la bonne volonté et l'objectivité de tout un chacun. Gageons toutefois qu’à plus ou moins long terme, le législateur devra sans doute s'emparer de cette problématique pour que l'éco-conception numérique s'applique de la même façon à tous.


Vous l'aurez compris, grâce au RGESN, la notion d’écoconception numérique se précise. Cependant, elle peut rester complexe à appréhender.

Chez Adimeo, nous vous accompagnons dans la mise en place de ces bonnes pratiques d’éco-conception. Que ce soit à travers un audit qui dresse l'état des lieux de votre projet ou par la mise en place des applications techniques, nos experts sont disponibles pour vous aider à transformer votre vision et à l'harmoniser dans une démarche éco-responsable globale.

Crédit photo : tashka2000

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Marie-Claire Taché
Directrice Conseil @ADIMEO
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