Qu’est-ce que le Web 3.0 ?
Le Web est apparu dès la fin des années 1980 en réponse à un besoin de partage des données. Cette première génération ayant été nommée Web 1.0, vous comprenez sans doute mieux l’appellation Web 3.0 (ou Web3) pour la troisième génération en cours de développement.
Il faut dire que les dernières avancées technologiques, comme la blockchain ou l’intelligence artificielle, ont largement permis de réfléchir le Web différemment. Pourquoi ? Pour répondre toujours mieux aux besoins des utilisateurs, évidemment !
C’est notamment pour cette raison que le Web 3.0 s’appuie en grande partie sur la décentralisation des données. En effet, actuellement, la plupart des applications Internet sont contrôlées (stockage et utilisation des données des utilisateurs finaux) par des entités centralisées. Or, le Web 3.0 entend justement rendre le contrôle de ces données aux utilisateurs finaux.
Toutefois, il serait réducteur de ne résumer le Web 3.0 qu’à cette notion. Entrons plus dans le détail.
Qu’est-ce que le Web 3.0 ou Web3 ?
Pour bien comprendre ce qu’est le Web 3.0, il est nécessaire de faire un petit retour en arrière et de découvrir ou redécouvrir l’histoire du Web, du moins en partie.
Du Web 1.0 au Web 2.0
Tout d’abord, sachez qu’Internet existait bien avant le Web.
Internet est un réseau mondial d’ordinateurs interconnectés qui permet l’échange de données et d’informations à l’aide d’un ensemble de protocoles de communication, dont le principal est le protocole TCP/IP. Ces informations circulent à travers divers équipements tels que les routeurs ou les serveurs. Autrement dit, Internet est l’infrastructure.
Le Web (World Wide Web, WWW) est une application qui utilise Internet pour fonctionner. Son fonctionnement repose sur un système de liens hypertextes qui relie différentes ressources entre elles (pages Web, images, vidéos, etc.). L’accès à ces ressources est possible grâce à un navigateur Web.
Le Web ne constitue donc qu’une partie d’Internet. Effectivement, il existe de nombreuses autres applications ou services qui utilisent Internet sans être liés au Web : l’envoi d’e-mails via des protocoles SMTP ou IMAP, le partage de fichiers via FTP, etc.
Pour simplifier, le Web est, en quelque sorte, un moyen d’accès aux informations présentes dans l’infrastructure qu’est Internet.
Au commencement, le Web 1.0 se composait seulement de textes et d’images statiques en lecture seule. Il n’était pas possible d’interagir avec les sites Web.
Puis, dans les années 2000, le Web 2.0 est arrivé, à savoir celui que nous connaissons encore actuellement. Cette deuxième génération participative a majoritairement pris forme avec l’arrivée des tout premiers réseaux sociaux, ancêtres de ceux que nous utilisons aujourd’hui. Au contraire de son aîné, le Web 2.0 a donc été conçu pour favoriser l’interaction avec la création d’espaces de partage et la circulation bidirectionnelle de l’information (forums Web ou boutique en ligne, par exemple).
Du Web 2.0 au Web 3.0
Depuis quelques années maintenant, on entend parler du Web 3.0 , une évolution qui se veut ouverte à tous (avec une conception ascendante), décentralisée et immersive. L’idée est notamment d’utiliser les technologies blockchain et Web sémantique pour devenir un réseau de données liées de manière sensée.
Sans rentrer dans les détails, car nous y reviendrons, le Web sémantique permet de générer, partager et connecter du contenu via une recherche basée sur l’analyse du sens du langage et non plus par de simples mots-clés. L’expansion de la recherche vocale par les utilisateurs de Google et de l’Internet mobile en est le parfait exemple.
Quant à la technologie blockchain (connue surtout pour son implication dans la cryptomonnaie), c’est elle qui permet la décentralisation des données, grâce à une base partagée simultanément avec tous les utilisateurs.
Concrètement, la décentralisation du Web 3.0 vise à transférer aux utilisateurs le contrôle des données jusqu’ici dévolu aux grandes entreprises (les GAFAM, par exemple) ou aux gouvernements centralisés. De plus, si le Web 2.0 est basé sur la création de contenu et l’interaction avec les sites Web, le Web 3.0 vise une immersion maximale dans l’expérience numérique (contrôle individuel des données personnelles, paiement en cryptomonnaies, etc.).
Quelles sont les caractéristiques du Web 3.0 ?
Nous avons déjà survolé quelques caractéristiques du Web 3.0 dans ce qui précède (intelligence artificielle, blockchain, Web sémantique), mais il en existe bien d’autres.
La blockchain et le Web 3.0
Comme la blockchain constitue l’une des grandes innovations du Web 3.0, commençons par elle. Il vous sera plus facile de comprendre le concept de décentralisation des données du Web 3.0.
La blockchain (chaîne de blocs en français) est une technologie qui permet de stocker, sécuriser et échanger des données de manière décentralisée. Autrement dit, elle est indépendante et sans organe de contrôle.
Chaque transaction constitue un bloc de la chaîne, laquelle est distribuée à travers un grand réseau d’utilisateurs à travers le monde. Chaque changement est vérifié et enregistré par chacun sans possibilité de modification. Ainsi, cette technologie repose sur la transparence, la sécurité et l’incorruptibilité.
La technologie de la blockchain est principalement connue pour son lien avec les cryptomonnaies, ces monnaies numériques décentralisées et non contrôlées par les banques centrales.
Si, à l’origine, son but était de faciliter les transactions entre deux personnes, et ce, sans passer par les banques, son utilisation est bien plus variée aujourd’hui. Après tout, les transactions ne sont que des données numériques. Le principe de chaîne de blocs peut donc être utilisé pour n’importe quelle donnée numérique. Et ça tombe bien, car le Web en regorge !
L’implication de la blockchain dans le Web 3.0 permet de transférer et sécuriser les données personnelles, de créer une identité numérique, ou de conclure un contrat intelligent (Smart Contract) pour assurer des interactions autonomes entre les personnes et les machines.
La décentralisation du Web 3.0
Maintenant que vous comprenez mieux le fonctionnement de la blockchain, intéressons-nous à la décentralisation, à savoir la caractéristique principale du Web 3.0.
Vous l’aurez compris, la décentralisation du Web 3.0 est rendue possible grâce à la technologie de la blockchain. Ainsi, les données sont scindées et hébergées par les ordinateurs des utilisateurs (peer-to-peer ou pair-à-pair, sous-entendu, d’utilisateur à utilisateur). Dans ce contexte, le Web 3.0 n’est plus alimenté par les data centers des grandes multinationales que sont les GAFAM.
Cette indépendance et le contrôle individuel des données par les utilisateurs forment ce que l’on appelle l’identité numérique décentralisée, ou l’identité augmentée.
En effet, outre le fait de contrôler et sécuriser les informations personnelles, l’identité numérique permet également de fluidifier l’expérience utilisateur grâce aux méthodes de vérification automatisée (contrat intelligent ou Smart Contract).
Bon à savoir : Un Smart Contract est un code informatique qui s’exécute automatiquement lorsque les conditions préalablement paramétrées sont réunies. L’action ou la transaction réalisée avec le contrat intelligent est conservée dans une blockchain. Ici, l’objectif est de se passer d’un tiers de confiance. C’est ce que l’on appelle le protocole de consensus.
Mais qu’en est-il de toutes les applications en ligne que l’on utilise ? À ce sujet, sachez que des applications décentralisées (DApps) sont également développées. Elles reposent, bien évidemment, sur le même concept. Ainsi, au lieu d’être gérées par un seul serveur, ces applications décentralisées sont gérées par un réseau d’ordinateurs.
Le Web 3.0 et la protection des données
La protection des données est un sujet central en matière d’utilisation d’Internet. Ces dernières années ont d’ailleurs été ponctuées par de grands changements, comme le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), la suppression des cookies tiers, etc.
Bien entendu, le Web 3.0 respecte le cadre réglementaire strict du RGPD et de l’eIDAS (identification électronique et services de confiance). Mais il est indispensable qu’il aille encore plus loin.
Rappelons que le Web 3.0 est basé sur la décentralisation des données grâce à la blockchain. Ainsi, les utilisateurs contrôlent et gèrent leur identité, et ce, sans l’intervention d’une partie tierce. On parle également de Self-Sovereign Identity (SSI), identité auto-souveraine en français. Tout cela permet évidemment une bien meilleure protection des données personnelles.
C’est d’autant plus le cas que dans les applications et services Web centralisés du Web 2.0, les utilisateurs doivent faire confiance à une autorité centrale pour gérer leurs données, leurs transactions et leurs interactions. Les données stockées sont ainsi confrontées à des risques de sécurité (piratage des serveurs, par exemple), de mauvaise gestion, ou d’utilisation abusive, comme la revente des données personnelles.
L’intelligence artificielle dans le Web 3.0
À moins d’avoir vécu dans une grotte, vous avez forcément entendu parler des dernières avancées en matière d’intelligence artificielle. Si cette dernière existe depuis plusieurs années, elle est aujourd’hui bien plus performante qu’autrefois, à tel point que le Web 3.0 s’appuie en grande partie sur elle.
Ainsi, le Web 3.0 se sert de l’IA pour présenter, traiter et trier les données, ce qui implique qu’il soit capable de comprendre le sens ou le contexte des requêtes des utilisateurs (Web sémantique). Il doit pouvoir répondre plus rapidement et plus précisément aux demandes complexes. Or, grâce à l’apprentissage automatique, l’intelligence artificielle est justement capable d’apprendre et de s’améliorer seule.
Les avantages de l’IA sont donc multiples dans ce cas de figure.
- Les publicités proposées seront plus personnelles, puisque les informations fournies sont adaptées à chaque utilisateur ;
- L’IA sera capable d’analyser les données et de les personnaliser selon les préférences de chaque utilisateur ;
- L’intelligence artificielle pourra détecter les informations frauduleuses.
- L’utilisation de l’intelligence artificielle devrait permettre d’améliorer le support client grâce à des chatbots encore plus intelligents.
Le Web sémantique dans le Web 3.0
Le plus grand bouleversement du Web 3.0 est probablement la notion de sémantique et non plus seulement de mots-clés. Jusqu’ici, les contenus des sites Web ou applications étaient en effet créés pour être lus par les humains, tout en prenant en compte la compréhension partielle des moteurs de recherche comme Google. Mais la notion de Web sémantique va plus loin : les contenus sont également compris par les machines.
Si le Web sémantique est effectivement un ensemble de standards et technologies qui permet de rendre le contenu Web plus accessible et utilisable par les utilisateurs, il permet aussi aux applications d’effectuer des tâches complexes en comprenant ledit contenu et le contexte des données grâce aux métadonnées et à l’intelligence artificielle.
Via la recherche et l’analyse du sens du langage au-delà des simples mots-clés, le Web 3.0 favorise une meilleure compréhension du contexte pour ainsi mieux identifier les véritables besoins des utilisateurs. Associé à l’intelligence artificielle, le Web sémantique devrait sans aucun doute booster la lisibilité, la créativité et l’interactivité des contenus.
Quels sont les avantages du Web 3.0 ?
Tout cela est bien beau, mais quels sont les intérêts du Web 3.0 ? Pourquoi se lancer dans de tels changements ? On vous le résume en 6 points.
- Le Web 3.0 se veut plus intuitif grâce à du contenu toujours plus précis. Il prend en compte l’historique et les habitudes de navigation ainsi que le profil de l’utilisateur pour proposer des recherches associées. Grâce aux différentes technologies du Web 3.0, les machines comprennent mieux l’information et adaptent leurs réponses de manière plus précise. En bref, elles connaissent mieux l’utilisateur ;
- Le caractère intuitif du Web 3.0 offre également une meilleure compatibilité avec tous les systèmes d’exploitation, les objets connectés et la recherche vocale (interopérabilité) ;
- Le Web 3.0 offre une plateforme sur laquelle il n’y a aucune restriction (genre, revenus, situation géographique, etc.) ;
- Le Web 3.0 permet la création d’un profil unique. Plus besoin de créer des comptes sur chaque site ou application ! Cerise sur le gâteau, l’utilisateur reste propriétaire des informations fournies pour son profil unique ;
- Le Web 3.0 garantit la confidentialité et le contrôle des données, puisque les utilisateurs peuvent utiliser le cryptage de leurs données personnelles. De plus, le stockage a lieu dans une blockchain. Ainsi, les entreprises qui souhaiteront accéder à certaines données et vérifier leur exactitude devront obtenir l’accord des utilisateurs ;
- Comme nous l’avons vu, le Web 3.0 améliore la pertinence et l’utilité des publicités en fonction du profil de l’utilisateur.
Quels sont les risques du Web 3.0 ?
Si la décentralisation et l’absence de contrôle centralisé du Web 3.0 sont ses plus grands avantages, il s’agit aussi d’un risque de sécurité.
En effet, le risque de cyberattaques ne doit pas être sous-estimé, d'autant plus que celui-ci est particulièrement élevé avec l’expansion de l’intelligence artificielle. D’ailleurs, nous sommes déjà confrontés à de nouveaux types d’attaques. Microsoft a prévenu que des cyberattaques utilisent déjà l’IA générative dans un rapport rédigé en collaboration avec OpenAI. Il y a donc fort à parier que de nouvelles menaces de cybersécurité continueront d’apparaître.
De plus, si le fait que les utilisateurs contrôlent eux-mêmes leur identité virtuelle contribue à une meilleure confidentialité sur le Web 3.0, il faut garder à l'esprit que les utilisateurs malveillants bénéficient des mêmes avantages. Dans une telle situation, comment identifier les auteurs de cyberattaques ou de manipulation de données ? C'est un risque d'autant plus grand qu’avec de telles dispositions, il sera compliqué de mettre en place une quelconque réglementation du Web 3.0.
Enfin, dernier inconvénient à mentionner, la technologie de la blockchain requiert énormément de ressources énergétiques. Par conséquent, le Web 3.0 sera encore plus consommateur que le Web 2.0, qui est pourtant déjà très gourmand en énergie.
Pour résumer, la force majeure du Web 3.0 est évidemment la décentralisation des données. Basée sur la technologie de la blockchain, elle permet de répartir les informations chez tous les utilisateurs et non plus au sein de quelques grands acteurs. L’objectif est de garantir une meilleure protection et gestion des données personnelles. Néanmoins, d'importantes questions restent en suspens et viennent ternir le tableau de tous les avantages présentés. Rendez-vous donc d'ici quelques années pour savoir si cette version utopique du Web a pu se démocratiser !
Crédit photo : maxkabakov