GPT-5 : OpenAI revoit sa copie après la sortie du nouveau modèle

Quand OpenAI annonce une nouvelle version de ChatGPT, le monde retient son souffle. Et GPT-5 était très attendu. Il faut dire que Sam Altman, le PDG d’OpenAI, avait alimenté la fébrilité ambiante avec des propos plus qu’élogieux quant à ce nouveau modèle.

Plus intelligent, plus rapide, capable de comprendre textes, images et sons, il promettait de franchir un cap décisif. Il ne s’agissait pas d’une mise à jour, mais d’améliorations significatives de l’intelligence artificielle proposée par OpenAI.

Pourtant, derrière le battage médiatique, les premiers retours des utilisateurs peignent un tableau plus nuancé, voire frustrant. Entre promesses ambitieuses, limites persistantes et polémiques sur l’opacité et le verrouillage de l’écosystème, GPT-5 semble cristalliser autant l’attente que la désillusion. On fait le point.

GPT-5 : le modèle le plus intelligent, le plus rapide et le plus utile à ce jour

Le CEO et cofondateur d’OpenAI, Sam Altman, a annoncé avoir été bouleversé en testant le nouveau modèle GPT‑5, « capable de faire des choses impressionnantes pour vous. Il peut instantanément créer un logiciel, à la demande […]. C’est un superpouvoir incroyable. ». Pour tout dire, il parle d’un vertige et d’une perte de contrôle et ose le parallèle avec le projet Manhattan.

Lancé en août 2025, ChatGPT-5 serait le modèle le plus puissant à ce jour, en promettant des améliorations significatives et en répondant aux attentes des utilisateurs.

OpenAI mettait alors en avant plusieurs améliorations clés de GPT-5 par rapport aux modèles précédents :

• un raisonnement amélioré (GPT‑5 thinking) « qui met les connaissances les plus pointues à la portée de tous », pour exécuter des chaînes de raisonnement plus longues et plus complexes, tout en réduisant les erreurs logiques et les hallucinations (réductions annoncées de 45 % par rapport à GPT-4o) ;
• un modèle plus intelligent grâce à des capacités améliorées en programmation, analyses financières, écriture, éducation et santé « à la pointe de la technologie » ;
• un routeur en temps réel qui détermine rapidement quel système utiliser et les outils nécessaires selon le type de conversation et l’intention explicite de l’utilisateur ;
• une multimodalité avancée qui intègre de manière plus fluide les entrées textuelles, visuelles et auditives, permettant ainsi une interaction plus naturelle et intuitive avec les utilisateurs ;
• une personnalisation accrue qui offre une meilleure adaptabilité aux préférences de l’utilisateur et l’intégration de Gmail et de Google Calendar (en cours de déploiement).

Autant d’améliorations qui avaient pour but de proposer un niveau de performance supérieur pour les entreprises, les développeurs et le grand public.

GPT-5 : entre attentes psychologiques et perception

GPT-5 se retrouve dans une position délicate, car le modèle doit répondre à des attentes extrêmement variées et élevées.

D’un côté, les entreprises et développeurs recherchent des améliorations concrètes, comme la génération de code, l’analyse de données ou la création de contenus multimédias. De l’autre, le grand public veut surtout une expérience plus intuitive, fluide et « magique ».

Et les premières réactions ne se sont pas fait attendre. Entre enthousiasme et scepticisme, les retours des utilisateurs sont pour le moins partagés.

Si certains saluent les améliorations apportées, notamment en matière de raisonnement et de personnalisation, d’autres, en revanche, expriment leur mécontentement face à des performances jugées décevantes, voire régressives : réponses plus courtes et moins informatives, tonalité plus froide, réduction de la créativité, etc.

Et alors qu’OpenAI annonçait un modèle d’un niveau doctorat, les utilisateurs évoquent un niveau inférieur qui ne dépasse pas celui de la maternelle, en notant entre autres des erreurs dans l’utilisation de faits simples. D’après certains tests réalisés par des utilisateurs, GPT-5 est même incapable de dresser une carte des États-Unis ou une liste des présidents américains.

Dans ce contexte, la décision radicale d’OpenAI de supprimer tous les modèles précédents, y compris le très populaire GPT-4o, a été vivement critiquée, d’autant plus qu’elle perturbait les habitudes et les flux de travail des clients payants (et les utilisateurs ne pouvaient plus choisir le modèle à utiliser).

Autre gros point de frustration relevé par les utilisateurs dès la sortie de GPT-5 : la limite d’utilisation pour les abonnés (80 messages toutes les trois heures pour les abonnés Plus).

Enfin, la personnalité de GPT-5 au ton jugé trop froid et inhumain est loin de faire l’unanimité.

Bien entendu, la perception des utilisateurs de GPT-5 peut être en partie biaisée, en particulier par le fait que les imperfections sont amplifiées par la comparaison avec GPT-4. Les utilisateurs comparent GPT-5 non seulement à sa version précédente, mais aussi à l’image idéalisée que la communication d’OpenAI a construite autour de ce nouveau modèle.

Cependant, Sam Altman admet une sortie « plus complexe que prévu », obligeant la firme à revoir sa version.

GTP-5 : OpenAI fait marche-arrière face aux critiques

En moins de 48 heures après la sortie de GPT-5, OpenAI a apporté des correctifs en réponse aux critiques des utilisateurs habitués à GPT-4o :

• la version ChatGPT-4o (modèles 4.1 et 4.5) est réintégrée pour les abonnés payants ;
• la limite de messages passe de 200 à 3 000pour les abonnés payants ;
• le ton de GPT-5 a reçu un correctif pour utiliser des tournures plus naturelles et se montrer plus chaleureux.

Quant à la régression en matière de performance des réponses, Sam Altman a déclaré qu’il s’agissait d’une panne de routeur survenue le jour de la sortie. Mais quid des lenteurs et des blocages ? OpenAI ne s’exprime pas sur le fond et se contente, selon les détracteurs, d’une mise à jour de façade, ce qui laisse planer des doutes sur l’utilisation réelle de GPT-5 dans certains contextes.

Il semble clair qu’OpenAI a sous-estimé l’attachement de sa communauté aux anciens modèles et sa tolérance zéro pour les régressions.

GPT-5 : le miroir d’une transition culturelle

Mais derrière le tollé de GPT-5 se cache une autre réalité : la manière dont l’intelligence artificielle est perçue et utilisée.

Contrairement à GPT-3 et GPT-4 accueillis avec émerveillement, GPT-5 est évalué avec un mélange de scepticisme, de critiques et d’exigence accrue. Or, cette différence de perception révèle un basculement culturel important.

L’intelligence artificielle cesse d’être perçue comme une révolution pour devenir un service numérique standard, soumis à une évaluation rationnelle et critique ainsi qu’aux mêmes critères de performance, de fiabilité et de transparence que n’importe quel produit technologique.

Autrement dit, l’intelligence artificielle est désormais jugée pour sa fonction, sa fiabilité et son utilité, plutôt que pour l’expérience fascinante qu’elle procure. GPT-5 a donc été considéré comme un produit mature plutôt qu’une expérimentation où le droit à l’erreur est encore permis.

Ce changement de perception illustre donc une normalisation de l’intelligence artificielle, dont la sortie de GPT-5 a été le miroir. Et ce basculement a plusieurs implications.

1. Pour OpenAI et les entreprises consœurs, la communication marketing ne peut plus se contenter de promesses et de révolution. Elle doit gérer les attentes avec plus de réalisme et démontrer les capacités réelles du modèle.
2. Pour les utilisateurs, la relation avec l’intelligence artificielle devient pragmatique, basée sur la productivité, la performance, la fiabilité et l’intégration dans des workflows professionnels ou personnels.
3. Pour la perception sociale, GPT-5 marque la fin de la naïveté collective autour de l’intelligence artificielle générative. Cette dernière est désormais vue comme un produit réel, puissant, mais imparfait et soumis à des contraintes techniques et éthiques.

GPT-5 marque donc moins une révolution technique qu’un tournant culturel, un basculement vers une évaluation critique et rationnelle.

De plus, GPT-5 se retrouve confronté à des modèles concurrents qui redéfinissent eux aussi les standards de performance dans le domaine (Anthropic et Google Gemini, notamment).

ChatGPT-5 face à une intensification de la concurrence

Le contexte de l’intelligence artificielle en 2025 est marqué par une intensification de la concurrence, ce qui met OpenAI sous une pression significative. Et bien que ChatGPT-5 demeure un modèle avancé, sa position de leader est dorénavant remise en question, surtout après l’échec de GPT-5.

Anthropic, avec son modèle Claude Sonnet 4.5, a récemment surpassé ChatGPT-5 dans des évaluations de performance sur des tâches professionnelles réelles. Claude AI a en effet démontré une capacité supérieure avec des réponses plus fiables dans des domaines tels que la programmation, la finance et le droit, établissant ainsi une nouvelle référence en matière d’efficacité et de fiabilité.

Google, avec sa version Gemini 2.5 Pro, offre aussi une intégration fluide dans son écosystème, surtout avec des outils comme Google Workspace et Android. Cette approche permet d’ailleurs à Gemini de se distinguer par sa rapidité et ses capacités dans des tâches qui nécessitent une interaction avec des données en temps réel, soit une efficacité accrue et des réponses plus rapides pour les entreprises et utilisateurs professionnels.

Inutile de dire que ces deux concurrents démontrent à eux seuls les défis d’OpenAI pour maintenir sa compétitivité.

Aujourd’hui, ChatGPT-5 n’est plus seulement évalué sur ses capacités techniques, mais également sur sa capacité à s’imposer dans un contexte international ultra-compétitif. La montée en puissance de ses deux principaux concurrents, Claude Sonnet 4.5 et Gemini 2.5 Pro, impose ainsi au leader contesté de redoubler d’efforts pour regagner la confiance des utilisateurs et prouver la valeur réelle de son modèle.

La sortie « plus complexe que prévu » de GPT-5 révèle surtout un changement de regard sur l’intelligence artificielle. La phase d’émerveillement a cédé la place à celle de l’exigence et de l’évaluation critique des capacités,de la fiabilité et de l’intégration dans un contexte réel d’utilisation. L’intelligence artificielle n’est plus un outil expérimental, c'est une actrice totalement intégrée dans nos pratiques professionnelles et culturelles, et soumise aux mêmes jugements que n’importe quel produit technologique mature. Alors que chaque innovation est comparée et challengée, l’intelligence artificielle doit désormais servir plutôt que surprendre.

Crédit photo : JohannesBluemel Photography